RNTI

MODULAD
Les nouvelles théories de l'incertain
In EGC 2014, vol. RNTI-E-26, pp.3-4
Résumé
La notion d'incertitude a été longtemps un sujet de controverses. En particulier la prééminence de la théorie des probabilités dans les sciences tend à gommer les différences présentes dans les premières tentatives de formalisation, remontant au 17ème siècle, entre l'incertitude due à la variabilité des phénomènes répétables et l'incertitude due au manque d'information (dite épistémique). L'école Bayésienne affirme que quelle que soit l'origine de l'incertitude, celle-ci peut être modélisée par une distribution de probabilité unique. Cette affirmation a été beaucoup remise en cause dans les trente dernières années. En effet l'emploi systématique d'une distribution unique en cas d'information partielle mène à des utilisations paradoxales de la théorie des probabilités. Dans de nombreux domaines, il est crucial de distinguer entre l'incertitude due à la variabilité d'observations et l'incertitude due à l'ignorance partielle. Cette dernière peut être réduite par l'obtention de nouvelles informations, mais pas la première, dont on ne se prémunit que par des actions concrètes. Dans le cas des bases de données, il est souvent supposé qu'elles sont précises, et l'incertitude correspondante est souvent négligée. Quant elle est abordée on reste souvent dans une approche probabiliste orthodoxe. Néanmoins, les statisticiens ont développé des outils qui ne relèvent pas de la théorie de Kolmogorov pour pallier le manque de données (intervalles de confiance, principe de maximum de vraisemblance...). De nouvelles théories de l'incertain ont émergé, qui offrent la possibilité de représenter les incertitudes épistémiques et aléatoires de façon distincte, notamment l'incertitude épistémique, en remplaçant la distribution de probabilité unique par une famille de distributions possibles, cette famille étant d'autant plus grande que l'information est absente. Cette représentation complexe possède des cas particuliers plus simples à utiliser en pratique, comme les ensembles aléatoires (théorie des fonctions de croyance), les distributions de possibilité (représentant des ensembles flous de valeurs possibles) et les p-boxes, notamment. Le but de cet exposé est de susciter l'intérêt pour ces nouvelles théories de l'incertain, d'en donner les bases formelles, d'en discuter la philosophie sous-jacente, de faire le lien avec certaines notions en statistique, et de les illustrer sur des exemples.